Oups... [Camélia]

Oups...

Appartement de Lee Campbell - 7 h 46

* Oh m*rde... Grillé... *

Assise par terre, sur les dédales humides d'une rue de New York, emmitouflée dans sa veste. Voilà où s'était retrouvée Camélia la veille au soir. Pourtant, sa journée avait bien commencée: levée de bonne humeur, elle était allée au travail, avait pris son café à 14h comme tous les jours, avait même eut le temps de s'avancer sur quelques planches qu'elle devait rendre beaucoup plus tard, et était repartie de l'agence à 18h30. Mais, une fois arrivée devant la porte de son appartement, elle avait été incapable de mettre la main sur ses clés. Elle les avait cherchées pendant plusieurs minutes vainement, allant même jusqu'à vider la totalité de son sac sur son paillasson. Mais au bout d'un quart d'heure de recherche infructueuse, elle avait été obligée d'admettre qu'elle les avait bel et bien perdues. Un mince espoir s'était alors installé dans son esprit, à l'idée qu'en revenant sur ses pas et en faisant le chemin qu'elle venait d'emprunter à l'envers, elle les retrouverait peut-être. Elle avait donc pris son courage à deux mains et, maugréant contre la terre entière, s'était mise en route. Une heure plus tard, elle grelottait de froid, n'avait toujours pas retrouvé ses clés, et pestait maintenant contre le bon Dieu qui ne s'était pas contenté aujourd'hui d'imposer sous ses yeux le vol de sac d'une mamie.

C'est alors que Lee était apparu, sortant d'une rue adjacente. Sur son cheval blanc aurait-elle plaisanté si elle n'était pas aussi fatiguée. D'ailleurs, elle était toujours aussi étonnée à chaque fois qu'elle le voyait. Elle, avait le chic pour se mettre dans des situations foireuses inimaginables et lui, avait le chic pour apparaitre à ces moments-là et la sortir de ses galères. A croire qu'il avait des pressentiments pour tout ce qui concernait Camélia. Quoi qu'il en soit, elle ne s'en plaignait pas, bien au contraire. S'il n'avait pas était là de nombreuses fois pour elle, la jeune femme ne sait pas ce qu'elle aurait fait.
Après l'avoir aidée à se relever, il l'avait donc conduite chez lui et sans lui poser de question sur son énième coup de malchance, lui avait gracieusement prêté son lit pour la nuit.

***

Il devait être un peu plus de 7h30 lorsque Camélia ouvrit les yeux, se réveillant après une nuit de sommeil paisible. Bercée par le son que l'eau de la douche de Lee produisait, elle mit un certain temps à se souvenir des péripéties de la veille et de l'endroit dans lequel elle était. Bien aise de ne pas s'être retrouvée dehors, la jeune femme prit quelques minutes pour s'étirer de tout son long avant de se redresser dans le lit, passant une main dans ses cheveux pour y remettre un semblant d'ordre. Jetant un coup d'œil circulaire dans la pièce, elle essaya d'adapter sa vue à la lumière, lorsque son regard fut attiré par un objet posé sur la table de nuit et qui n'aurait normalement du jamais s'y trouver. Fronçant les sourcils, certaine que son imagination lui jouait des tours, Camélia s'avança vers l'extrémité du lit. Avec un hoquet d'horreur, elle s'aperçut alors que son imagination n'avait pour une fois rien à voir là dedans et qu'un revolver était bel et bien négligemment posé sur cette table de nuit. Restant quelques secondes pétrifiée (elle détestait les armes à feu), Camélia reprit cependant contenance et, se levant, saisit précautionneusement l'arme.
Rien que le fait de tenir cet objet meurtrier entre ses mains lui déclencha de violents frissons le long de la colonne vertébrale. Elle ne pouvait pas y croire, ou du moins ne voulait pas y croire. Détaillant l'arme à feu sous tout ses angles, elle fut bien obligée d'en arriver à le conclusion que c'en était une vraie.

S'apercevant soudainement de la présence d'une seconde personne dans la chambre, Camélia se retourna et se figea sur place lorsqu'elle vit Lee, appuyé contre le cadre de la porte. Esquissant un imperceptible mouvement de recul, tenant toujours fermement le revolver dans ses mains, elle le détailla d'un regard anxieux (et peureux ?), des dizaines de questions se bousculant dans sa tête. Elle ouvrit la bouche, mais aucun son ne put en sortir.

« C... C'est pas ce que tu crois Cam... »

Des hypothèses toutes plus farfelues les unes que les autres lui avaient traversé l'esprit, mais étrangement, à aucun moment Camélia n'avait songé au fait de le dénoncer ou de se saisir de son cellulaire et de composer le numéro des autorités. Elle l'aimait sans doute trop pour faire ça. Et pour dire vrai, elle ne se sentait pas réellement en danger. Elle avait extrêmement peur de ce qu'elle pouvait découvrir sur lui mais avait encore l'audace de penser qu'il ne pouvait rien lui faire. Pas à elle. Et la jeune femme avait beau essayer, elle n'arrivait pas à imaginer Lee, tenant ce revolver, s'en servant pour ôter la vie à des personnes qui n'avaient rien demandé. Pas lui. Les autres, oui. Mais pas lui. Il ne pouvait pas faire ça, c'était impossible. Cela ne collait pas avec l'image de grand frère protecteur qu'elle avait de lui. Mais après tout ne dit-on pas que les apparences sont trompeuses ? Si cette arme à feu se trouvait là, sur sa table de nuit, ce n'était pas sans raison.

Comme dans un état second, la jeune femme le fixait, incapable de prononcer un mot. Il s'avança très doucement dans sa direction, sans doute avait-il peur de l'effrayer davantage, mais elle ne bougea plus d'un cil, pétrifiée.

« C... C'est pas ce que tu crois Cam... »

fut tout ce qu'il trouva à dire.
Un rire nerveux lui échappa malgré elle.

« Pas ce que je crois ? »

lâcha-t-elle dans un souffle. Elle le dévisagea, crédule. Lui aussi semblait anxieux et rempli de doutes. Des émotions qu'elle n'avait encore jamais vu apparaître dans son regard. Il était toujours si sûr de lui d'habitude. Alors... cela voudrait dire qu'il avait quelque chose à se reprocher ?
Tenant toujours l'arme à bout de bras, Camélia secoua la tête pour y enlever cette mauvaise pensée. Elle aurait préféré que cette scène ne se déroule jamais. Elle aurait même préféré passer la nuit dehors plutôt que d'être confrontée à pareille situation. Pourquoi avait-il fallu qu'il apparaisse une fois de plus comme par magie pour la sauver ?

Elle ne sut pour quelle raison, mais à mesure que Lee avançait vers elle, ses doigts se crispaient un peu plus à chaque fois sur le revolver. Surement l'instinct humain. Et autant dire qu'elle n'aimait pas ça du tout. Pourquoi restait-elle plantée là, à ne pas réagir ? Pourquoi même ne prenait-elle pas ses jambes à son cou ? Elle avait envie de lui hurler dessus, de le ruer de coups de poings pour lui faire ressentir ne serait-ce qu'une infime partie du mal que lui procurait le simple fait de pouvoir le considérer comme un meurtrier. Mais son corps ne semblait pas vouloir suivre le mouvement. Heureusement pour lui, malheureusement pour elle.

Reprenant quelque peu contenance, Camélia releva le bras pour lui montrer l'arme qu'il connaissait si bien.

« T'as un flingue chez toi. Un flingue bordel. Qu'est-ce que je suis censée penser ? »

demanda-t-elle d'une voix un peu trop précipitée pour être tout à fait naturelle.

« Qu'est-ce que tu penses ? »

Pourquoi avait-il fallu qu'ils en arrivent là ? Si Camélia n'avait pas été aussi tête en l'air, si elle n'avait pas perdu ses clés la veille au soir, si elle ne s'était pas retrouvée sur son chemin, ou même si elle ne s'était réveillée ne serait-ce qu'un quart d'heure plus tard, rien n'aurait changé, tout serait normal dans le meilleur des mondes. Et pourtant, il avait fallu que Lee fasse cette erreur de débutant: oublier son revolver à bonne vue de la jeune femme. Camélia aurait mille fois préféré ne rien savoir, ne rien soupçonner même, et qu'il exécute ses affaires sans qu'elle ne le sache. Si ses idées se révélaient être vraies, alors elle devenait quoi ? Complice ? Hors de question. Pourtant elle ne pouvait pas non plus faire comme si de rien n'était.

La voix du jeune homme la fit soudain sortir de ses pensées lorsqu'il demanda

« Qu'est-ce que tu penses ? »

Ce qu'elle pensait ? Peu importe ce qu'elle pensait ! Il retournait les questions qu'elle lui posait dans son sens maintenant, ce qui eut le don de l'exaspérer. Sans doute essayait-il de gagner du temps. Il n'avait très certainement aucune envie de s'expliquer sur la présence de cette arme à feu chez lui, et d'ailleurs, d'une certaine façon, Camélia n'avait aucune envie d'entendre ses histoires non plus. Mais elle savait aussi qu'elle ne partirait pas de cet appartement sans avoir eu droit à des explications qui tiennent la route. Très contradictoire comme situation, non ?

Ignorant donc les paroles de son interlocuteur, la jeune femme passa sa main libre dans ses cheveux en bataille avant de poser une fois de plus son regard sur l'arme. Assassin ? Tueur à gages ? Elle n'arrivait pas, ou ne voulait pas, le voir comme un de ces abrutis que l'on voyait à la télévision et qui s'amusait à gâcher sa vie en semant le trouble dans la ville de New York. Que pouvait-il y trouver de gratifiant ? Franchement, elle ne voyait pas.

« Tu m'expliques ? »

fut la seule question raisonnable qu'elle réussit à poser. Arquant un sourcil interrogateur, elle releva la tête. A force d'avancer dans sa direction, Lee se trouvait maintenant à une assez bonne distance pour pouvoir se saisir de l'arme. Tendant son bras vers la main de Camélia, il ne la lâcha cependant pas des yeux, comme pour ne pas la perdre de vue. Alors quoi ? Il avait peur qu'elle fasse une connerie ? Qu'elle lui tire dessus ? Ou alors il pensait qu'elle était maladroite au point de pouvoir se blesser elle-même ? Cette perspective lui aracha un mince sourire ironique: il fallait avouer que cela lui ressemblait tout de même un peu.

Jetant un bref coup d'œil à la main tendue de Lee, Camélia ne se résolut pas pour autant à lui rendre son revolver. D'ailleurs, si elle avait eu un peu plus de culot, elle l'aurait jeté par la fenêtre pour qu'il n'ait plus jamais l'occasion de s'en servir.

« Explique moi ! »

exigea-t-elle une nouvelle fois d'un ton brusque.

« Je pense que tu as compris non ? Rien que le revolver, ça ne te donne pas une idée ? »

« Donne-la moi s'il te plaît. »

Plus le temps passait, plus Lee se rapprochait d'elle et plus la situation lui échappait. Camélia ne s'était encore jamais retrouvée face à de pareilles conditions et ne s'était franchement jamais vraiment posé la question de comment elle réagirait si elle découvrait qu'un de ses plus proches amis était un assassin. Assassin, tueur à gages, c'était du pareil au même pour elle. Dans les deux cas, des vies étaient en jeu et des cadavres aussi. Et face à cela, elle ne savait vraiment pas comment réagir. De la peur, elle était passée à l'anxiété, puis ensuite à la colère. Et maintenant, elle se retrouvait là, plantée comme un piquet à le regarder en face d'elle, sans vraiment le voir.
Il dut d'ailleurs se rendre compte qu'elle n'était pas encore résolue à lui rendre son arme puisque son bras tendu vers cette dernière s'abaissa bien vite. Il sembla abandonner son objectif premier qui était de récupérer son bien, au profit des réponses tant attendues par la jeune femme.

« Je pense que tu as compris non ? Rien que le revolver, ça ne te donne pas une idée ? »

Il avait dit ces simples phrases avec tant de calme, tant d'indifférence même, que Camélia resta complètement ahurie. Alors il trouvait ça normal, ça ne le gênait même pas ? Lorsqu'elle partait au boulot le matin, lui s'en allait, revolver en poche, liquider plusieurs personnes sous prétexte qu'elles avaient fait des choses qui n'avaient pas plus à certains ?
Bon Dieu, pourquoi n'essayait-il même pas de se défendre ? Pourquoi n'inventait-il pas une excuse qu'elle aurait gobée avec joie ne serait-ce que pour s'enlever toutes les horribles images qui germaient dans son esprit ? Il aurait eu tellement de facilité pourtant à lui faire croire qu'il possédait une arme simplement pour se défendre. "Au cas où", comme on dit. Après tout, c'était monnaie courante à New York.
Maintenant que ses idées semblaient avoir été confirmées par Lee, Camélia aurait mille fois préféré qu'il lui cache la vérité.

« Donne-la moi s'il te plaît. »

se contenta-t-il ensuite de lui demander. Un peu perdue, Camélia le fixa pendant de longues secondes sans rien dire. Puis finalement, son regard toujours ancré dans celui de Lee, elle abaissa son bras et lui rendit son arme à feu. Puisque c'était tout ce qui lui importait.

HJ : ^^ Non t'inquiète, je le trouve bien moi =D

« Tu vas me dire que tu n'as pas entendu parler de la hausse de la criminalité à New-York ? J'ai pris ce revolver à un jeune qui l'avait et qui s'amusait avec... Comme si c'était un jouet ! Le pire c'est qu'il savait que c'était un vrai ! »

« Merci. »

« Tu vas me dire que tu n'as pas entendu parler de la hausse de la criminalité à New-York ? J'ai pris ce revolver à un jeune qui l'avait et qui s'amusait avec... Comme si c'était un jouet ! Le pire c'est qu'il savait que c'était un vrai ! »

Voilà ce que lui avoua Lee. Sa voix était toujours aussi calme et mesurée et l'anxiété qu'il avait laissé paraître quelques minutes plus tôt lorsque Camélia venait de découvrir son revolver s'était bel et bien envolée. Fronçant les sourcils face à cet aveu, la jeune femme essaya d'analyser la situation: soit Lee était capable de lire dans ses pensées et dans ce cas là, il venait donc de lui monter un sacré bateau pour que son beau monde reste intact, soit ça l'amusait de la faire tourner en bourrique et il lui avait d'abord laissé le temps de se faire d'horribles films avant de lui avouer la vérité. Mais comment savoir, comme démêler le vrai du faux ? Lee était tellement imprévisible et tellement apte à cacher ses émotions des fois, que Camélia n'arrivait jamais vraiment à le cerner. Depuis le temps qu'elle le connaissait, elle avait appris à faire avec mais à ce moment précis, un descripteur spécial Lee Campbell n'aurait pas été de refus !

Lorsque Camélia se décida à lui rendre son arme, Lee parut lui-même durant l'espace de quelques secondes un peu surpris que l'action se fasse aussi vite et facilement. S'en emparant, il la plaça dans sa ceinture avant de reposer son attention sur la jeune femme et de la remercier. Mais Camélia ne bougea toujours pas d'un cil, encore suspicieuse à l'égard de ses paroles.

Seulement quelques minutes auparavant, elle pensait réellement qu'elle aurait préféré qu'il lui mente plutôt que d'apprendre une vérité qu'elle n'aurait pas pu supporter. Mais maintenant qu'elle était face à des aveux dont elle n'était pas sûre qu'ils soient sincères, elle doutait. Arriverait-elle à lui parler comme si de rien était devant un café, par exemple, tout en sachant qu'il lui cachait peut-être une grande partie de sa vie ? Elle en avait trop vu ce matin pour pouvoir faire l'impasse dessus. Toujours aussi stoïque, Camélia reprit cependant la parole.

« Ça t'amuse de me laisser croire des trucs inimaginables ? »

Sa voix avait retrouvé son ton habituel, plus posé qu'il y a quelques minutes.

« Depuis combien de temps t'as cette arme avec toi ? »

demanda-t-elle ensuite. Cette question ne l'aiderait pas franchement à vérifier la sincérité des propos de Lee, mais cette information était toujours bonne à savoir. Du moins s'il lui donnait une réponse vraie elle aussi.

HJ : Hihi ^^ C'est pas fait exprès en plus. J'avais pensé au truc de la défense, mais j'arrivais pas à le placer xD alors j'ai profité de ton post. =D

« Il n'y a pas grand chose qui m'amuse en ce moment. Tu es en train de m'accuser de... de je ne sais même pas quoi d'ailleurs ! »

« Je sais pas moi... Deux jours je crois. »

« T'as peur de quoi Cam' ? Je suis quoi pour toi ? »

Elle devait être entrain de l'énerver au fond, avec toutes ses suspicions. Du moins c'est ce qu'elle soupçonnait puisqu'il lui était impossible de s'en apercevoir en le regardant étant donné qu'il continuait à contenir ses émotions. Et pour tout dire, si il y avait bien une chose qu'elle n'aimait pas, c'était de devoir lui tirer dans les pattes de cette façon.
Lorsque Lee rétorqua

« Il n'y a pas grand chose qui m'amuse en ce moment. Tu es train de m'accuser de... de je ne sais même pas quoi d'ailleurs ! »

Camélia ne put retenir un soupir. Croisant les bras sur sa poitrine, n'ayant toujours pas bougé de l'endroit où elle se trouvait, elle répondit après un court instant

« Je n'suis pas entrain de t'accuser Lee. »

Ce qui était vrai. Elle n'était pas assez sûre d'elle à ce moment précis pour se permettre un tel jugement par rapport à la situation. Et elle n'avait aucune envie de l'accuser de quoi que ce soit d'ailleurs, ce n'était pas son but et ça ne lui apporterait aucune reconnaissance. Tout ce qu'elle voulait, c'était savoir la vérité.

A y penser la situation était quand même dingue ! On parlait de Lee Campbell, bordel. Son Lee. Celui qui l'avait sortie maintes fois de ses galères. Pas d'un assassin reconnu. Elle ne savait même pas comment ils pouvaient en être arrivés à un tel degré de connerie alors que la matinée avait si bien commencée. Toute cette histoire était réellement absurde. Pourquoi n'arrivait-elle pas tout simplement à laisser tomber ? Peut-être parce qu'une arme et les conséquences qu'elle pouvait engendrer n'étaient pas anodines.
Camélia allait perdre la tête si ça continuait. Tout ce qu'elle pensait était contradictoire. Une partie de son cerveau lui conseillait fortement de ne pas pousser à bout l'homme qui se trouvait en face d'elle et de gentiment faire abstraction des dernières minutes écoulées tandis que l'autre partie lui assurait qu'elle ne pouvait pas se fier à ce qu'il lui avait dit et qu'elle devait trouver un moyen d'être sûre de sa sincérité.

Lorsque Lee reprit la parole, ce fut pour lui apprendre qu'il pensait être en possession de cette arme depuis deux jours. Mais à y réfléchir, Camélia ne savait même plus pourquoi elle lui avait demandé ce renseignement. Cela ne lui assurait absolument rien du tout. Et de toute façon, il ne lui donna même pas le temps de répondre puisqu'il ajouta presque immédiatement

« T'as peur de quoi Cam' ? Je suis quoi pour toi ? »

Ces deux simples questions la déstabilisèrent complètement et elle resta ahurie durant quelques secondes. Sûrement l'effet recherché par Lee d'ailleurs. Mais se ressaisissant par la suite, l'ahurissement fit place à une pointe de colère et, fronçant les sourcils, Camélia rétorqua un

« Comment ça ? »

avant d'enchaîner directement sur un ton vif.

« Si j'me baladais devant toi avec un revolver, tu penserais quoi ? »

« Si tu le dis. »

« J'en sais rien moi ! Mais je ne penserai sûrement pas que tu es une meurtrière. »

« Tu comptes venir prendre ton p'tit déj' ou pas ? »

Lorsque Camélia lui assura qu'elle n'était pas entrain de porter une quelconque accusation à son égard, Lee sembla la croire. D'ailleurs, elle, à son contraire, ne savait pas du tout mentir. Certains de ses tics spécial mensonges, comme celui de se mordre la lèvre par exemple, la faisaient à chaque fois se démasquer bien vite. Elle en avait pleinement conscience, mais ne pouvait rien faire contre; elle n'arrivait tout simplement pas à les contrôler.

Après qu'elle lui eut demandé comment lui réagirait si c'était elle qui se promenait avec un revolver sous son nez, Lee lui rétorqua bien vite

« J'en sais rien moi ! Mais je ne penserai sûrement pas que tu es une meurtrière. »

Cette réponse sonna comme un reproche aux yeux de Camélia. Lee semblait s'être parfaitement rendu compte de l'idée qui avait germé dans son esprit et de toute évidence il n'aimait pas ça du tout. Parce que ses soupçons étaient faux et le blessaient ? Ou bien parce que c'était la vérité qu'il essayait de lui cacher depuis le début ?

Après une courte pause, il sembla se décider à reprendre la parole, cette fois-ci sur un ton tout à fait normal, comme si leur précédente conversation n'avait jamais existé.

« Tu comptes venir prendre ton p'tit déj' ou pas ? »

Camélia haussa les sourcils, surprise. Cette question lui parut complètement étrange, placée dans le contexte présent. A vrai dire, elle n'avait pas tellement faim et surtout, elle ne se voyait pas partager un café avec Lee, l'air de rien, riant et bavardant comme ils le faisaient si bien d'habitude.

Secouant légèrement la tête en signe de négation, la jeune femme baissa les yeux et répondit un léger

« Non, laisse tomber... »

Contournant Lee et bougeant de ce fait pour la première fois depuis plusieurs minutes, Camélia s'affaira ensuite à reprendre toutes ses affaires. Elle posa sa veste sur ses épaules, prit son sac d'une main et ses chaussures de l'autre puis ajouta

« Je vais rentrer chez moi. »

Enfin, "rentrer" était un bien grand mot. Elle allait d'abord appeler un serrurier et essayer de remédier à la perte de ses clés plutôt. Mais qu'importe, elle préférait même se retrouver à la rue plutôt que de rester ici à ressasser tout ce qui lui était passé par la tête. Se dirigeant vers la porte de la chambre de Lee, elle se stoppa néanmoins durant quelques secondes pendant lesquelles elle lui fit face et lâcha un bref

« Merci pour hier soir. »

Puis elle s'engagea dans le couloir qui menait à l'entrée.

« Mais Cam' attend ! Mais qu'est-ce qui t'arrive ? Pourquoi tu fuis comme ça ? »

Face à son imprévisible réaction de départ, Lee mit un certain temps à réagir. De toute évidence, il ne s'était pas attendu à ce que Camélia réagisse de façon aussi brutale. Lorsqu'il réalisa qu'elle était entrain de partir, il s'engagea rapidement dans le couloir à sa suite, et alors que la jeune femme s'apprêtait à quitter définitivement l'appartement, elle sentit une pression autour de son poignet -pression assez forte pour l'immobiliser sur place et l'empêcher de sortir dans le couloir de l'immeuble. Lee l'avait rattrapée juste à temps et lui faisait de nouveau face.

« Mais Cam' attend ! Mais qu'est-ce qui t'arrive ? Pourquoi tu fuis comme ça ? »

La remarque fusa d'elle-même sans qu'elle n'ait eut le temps d'y réfléchir.

« Je ne fuis pas ! »

Ou bien si ? Soupirant, Camélia dégagea sèchement son poignet de l'étreinte de Lee, puis passa ses mains sur son visage afin de reprendre ses esprits. En tout cas, si c'était le cas, et qu'elle était donc bel et bien entrain de le fuir, cela n'avait rien à voir avec la possible peur qu'il aurait pu, ou du, lui inspirer. Peut-être était-elle complètement inconsciente, et sans doute ne pensait-elle même pas aux risques que toute cette histoire pouvait engendrer de son côté, mais si elle voulait quitter les lieux, ce n'était en aucun cas parce qu'elle craignait pour sa vie. Non. Pour dire vrai, après avoir reconsidéré la situation, à ce moment précis elle craignait plutôt pour sa vie à lui. Et surtout pour leur relation: la jeune femme tenait énormément à son amitié avec Lee et ne voulait absolument pas que cette histoire les éloigne.

Laissant retomber ses bras le long de son corps, Camélia secoua la tête avant de replonger son regard dans le sien.

« C'est juste que... J'ai pas envie qu'on s'engueule Lee. Et je sens que c'est ce qui va arriver si je reste ici parce que tu vas te borner à me raconter des conneries. »

Après cette réponse, elle s'attendait à ce que Lee essaye encore une fois de se défendre, il était si bien lancé maintenant. C'est pourquoi, ne lui laissant pas le temps d'ouvrir la bouche, elle ajouta

« Et quand bien même j'admettrais que cette histoire soit vraie, tu ne verrais pas d'objection à venir rendre ce revolver à la police avec moi ? »

Vlan. La question piège venait d'être lancée. Après tout, quel tueur à gage serait assez stupide pour aller lui-même se rendre à la police en lui apportant, en plus, des preuves sur un plateau d'argent ?
Camélia ne voulait pas en arriver à ce point-là. Elle voulait simplement entendre la vérité de sa bouche plutôt que de devoir fouiner (chose qu'elle n'appréciait pas du tout d'ailleurs) et de découvrir toute seule tout ce qu'il s'efforçait de cacher.

» CAMÉLIA • win or die.